Le raffinement de la responsabilité de l'État pour des décisions juridictionnelles fautives rendues en dernier ressort

Spotlight
15 mars 2015

La responsabilité de l'État du chef d'un acte juridictionnel fautif ne peut en règle être engagée que si l'acte litigieux a été retiré, réformé, annulé ou rétracté, par une décision passée en force de chose jugée, en raison de la violation d'une norme juridique établie. Ce principe était récemment raffiné par la Cour Constitutionnelle dans un arrêt du 30 juin 2014 (n° 99/2014)  en ce qui concerne la responsabilité de l'État pour des fautes d'une juridiction ayant statué en dernier ressort.

Une interprétation conforme à la Constitution de l'article 1382 Code civil implique selon la Cour Constitutionnelle que la responsabilité de l'Etat peut être engagée en raison d'une faute commise par une juridiction ayant statué en dernier ressort, même si cette décision n'a pas été retirée, rétractée, réformée ou annulée. Il est toutefois exigé que la faute consiste dans une violation suffisamment caractérisée des règles de droit applicables et que les voies de recours disponibles ne permettent pas d'obtenir l'anéantissement de la décision.

L'arrêt a été rendu sur une question préjudicielle posée à l'occasion d'une affaire relative à une action en responsabilité intentée par une commune contre l'État belge pour des fautes prétendument commises par le Conseil d'Etat. En l'espèce la commune n'était pas en mesure d'obtenir, par l'exercice des voies de recours disponibles, l'anéantissement de l'arrêt du Conseil d'État. 

Il est remarquable que la Cour Constitutionnelle utilise le concept de "violation suffisamment caractérisée" qui est emprunté à la juridiction de la Cour de justice de l'Union européenne. Auparavant, la Cour de cassation n'avait pas laissé de place à ce concept dans le contexte de la responsabilité extracontractuelle pour des dommages causés par un acte administratif qui était contraire au droit de l'Union européenne.