Ce 13 novembre 2015, le Conseil des ministres a approuvé et transmis pour avis au Conseil d'Etat deux projets d'arrêtés royaux qui complètent la transposition de la directive 2014/59 établissant un cadre pour le redressement et la résolution des établissements de crédit et des entreprises d'investissement ("BRRD").
Ces arrêtés introduisent dans la loi du 25 avril 2014 relative au statut et au contrôle des établissements de crédit ("loi bancaire") les principes du "bail-in" et les dispositions relatives au redressement et à la résolution de groupe.
Le contexte
La loi bancaire avait réalisé la transposition en droit belge de la plupart des dispositions européennes relatives au régime prudentiel bancaire résultant de la CRD IV. La BRRD n'était pas encore adoptée à ce moment-là. Elle a été adoptée le 15 mai 2014.
La loi belge n'avait pas pu transposer deux parties importantes de la BRRD: le mécanisme de renflouement interne ("bail-in") et la résolution dans le cadre d'un groupe. Ces éléments seront tout prochainement transposés, par voie d'arrêtés royaux adoptés en application de l'article 387 de la loi bancaire et par des dispositions légales votées dans le cadre d'un projet de loi contenant des dispositions financières diverses actuellement soumise à la Chambre (projet du 17 novembre 2015, Doc. Parl. 54-1459/001). Ces dispositions devraient être votées rapidement et entrer en vigueur le 1er janvier 2016.
Résolution du groupe
Le projet de loi contenant des dispositions financières diverses modifie notamment l'article 229 de la loi bancaire pour supprimer la possibilité d'exempter un établissement de crédit du plan de résolution, sauf certains établissements faisant partie d'une fédération au sens de l'article 239 de la loi bancaire. La nouvelle disposition permettra par contre à l'autorité de résolution de déroger aux obligations en matière de contenu du plan de résolution dans la mesure où "une telle dérogation se justifie au regard de l'impact que la défaillance et la liquidation de l'établissement de crédit dans le cadre d'une procédure de liquidation sont susceptibles d'avoir sur les marchés financiers, sur d'autres établissements de crédit, sur les conditions de financement ou plus généralement sur l'économie" (article 229, § 4, nouveau, qui reproduit l'article 4.1, BRRD).
L'organisation de la résolution des défaillances de groupe fait l'objet d'un des deux arrêtés royaux en projet. La BRRD organise un système complexe de coopération entre les autorités de résolution pour aboutir, dans toute la mesure du possible, à un plan de résolution de groupe qui résulte d'une "décision commune de l'autorité de résolution au niveau du groupe et des autorités de résolution au niveau des filiales" (article 13.3 BRRD). Les intérêts nationaux en jeu restant considérables, il n'est pas exclu que cette ambition se heurte en pratique à des difficultés importantes. La résolution anticipée des obstacles à une décision commune purgera dans une large mesure le cadre institutionnel européen qui, lors de la crise de 2008, avait fait la démonstration d'un déficit significatif de coopération entre les autorités compétentes.
Bail-in – MREL
Les dispositions relatives au bail-in (le "renflouement interne") devront être réglées par les arrêtés royaux en projet. Ils identifieront les "engagements éligibles" (engagements autres que ceux visés à l'article 44, § 2, BRRD), c'est-à-dire des dettes de l'établissement qui, avec les fonds propres de cet établissement (ensemble: le "MREL" ; article 45 BRRD), pourront être réduits par décision de l'autorité de résolution si cette mesure s'impose (article 43, § 3, BRRD) et qu'elle ne crée pas une situation plus défavorable pour les détenteurs de ces engagements que si l'autorité de résolution avait laissé l'institution défaillir conformément au droit commun ("no creditor worth off").
Les dispositions de la BRRD, relatives à l'exigence minimale de fonds propres et d'engagements éligibles ("MREL") doivent en principe être d'application à partir du 1er janvier 2016 (article 130.1, BRRD). Les mesures de résolution qui s'appliqueront aux passifs qui composent le MREL (réduction et conversion de dettes éligibles) devraient assurer une recapitalisation conforme aux exigences prudentielles applicables à une entité bancaire à l'issue de la mise en œuvre de ces mesures de résolution. Un projet de normes techniques de réglementation de l'EBA du 3 juillet 2015 (EBA/RTS/2015/05) indique le niveau de MREL qui serait imposé aux établissements de crédit.
La manière dont ces exigences seront appliquées au niveau d'un groupe pose des questions complexes et il existe très peu d'indication, au niveau des instances européennes, concernant la manière dont ces exigences devront être rencontrées d'un point de vue consolidé.