Une "zone de sécurité" ("safe harbour") plus limitée pour les entreprises munies de faibles parts de marché

Spotlight
15 septembre 2014

Le 25 juin 2014 la Commission européenne a adopté la version révisée de la "Communication de minimis". La Commission confirme que les accords entre entreprises ayant de faibles parts de marché ne doivent pas être examinés au regard des règles de concurrence. Néanmoins, compte tenu de l'évolution de la jurisprudence de la Cour de justice, les accords qui comprennent une restriction par objet ne tombent plus en dehors du champ d'application des règles de concurrence.

Les règles de concurrence interdisent les accords qui ont pour objet ou pour effet de restreindre "sensiblement" le jeu de la concurrence. Dans la "Communication de minimis", la Commission précise les accords qui ne sont pas capables de restreindre sensiblement la concurrence et qui tombent par conséquent en dehors du champ d'application des règles de concurrence ("zone de sécurité") :

  • les accords entre des concurrents (existants ou potentiels) dont les parts de marché cumulées ne dépassent pas 10% sur chacun des marchés en cause affectés par lesdits accords, et 
  • les accords entre non concurrents dont les parts de marché ne dépassent pas 15% sur chacun des marchés en cause affectés.

La Commission confirme qu'elle n'engagera pas de procédure vis-à-vis des accords couverts par la "zone de sécurité". En outre, la Commission n'infligera pas d'amende aux entreprises qui estiment de bonne foi que les seuils de part de marché ne sont pas dépassés. La Communication n'est pas contraignante vis-à-vis des autorités nationales de concurrence et des cours nationales. Il s'ensuit que des accords couverts par la "zone de sécurité" peuvent en principe encore faire l'objet de procédures sur la base du droit national de la concurrence.

Dans l'arrêt Expedia du 13 décembre 2012 (C-226/11) la Cour de justice a jugé qu'un accord ayant un objet anticoncurrentiel constitue, par sa nature et indépendamment de tout effet concret de celui-ci, une restriction sensible du jeu de la concurrence. En conséquence, la Communication de minimis précise que les restrictions par objet ne peuvent plus bénéficier de la "zone de sécurité". La nouvelle Communication précise aussi que les restrictions caractérisées couvertes par des exemptions par catégorie (actuelles ou futures) doivent être considérées comme des restrictions par objet.

La Communication est accompagnée d'un document de travail des services de la Commission qui liste les restrictions par objet sur la base de la jurisprudence des juridictions européennes et de la pratique décisionnelle de la Commission. La liste n'est pas exhaustive et il n'est pas exclu que la Commission constate d'autres restrictions par objet.

Le fait que des restrictions par objet contenues dans des accords passés entre des entreprises ayant des parts de marché faibles ne soient plus exclues du champ d'application des règles de concurrence ne signifie pas nécessairement qu'elles soient interdites. Cela étant, l'exclusion des restrictions par objet de la "zone de sécurité" augmentera l'insécurité juridique, ce d'autant plus qu'un nombre croissant d'arrangements sont qualifiés de restrictions par objet.